Les jardins d'Hélène

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Coltan song (Collectif Black Bone tome 1) – Causse, Urien, Mazas, Jean-Préau

13 Août 2020, 12:25pm

Publié par Laure

Tout est réussi dans ce roman pour ados à partir de 15 ans (et même avant à mon humble avis) : le projet novateur, l’écriture, les thèmes abordés, le collectif d’auteurs, l’intrigue ; j’ai passé un excellent moment de lecture.

Marie Forget, 18 ans à peine, perd sa mère dans un accident de la circulation. Comment Irène, grand reporter aguerrie aux conditions extrêmes dans des pays en guerre a-t-elle pu être bêtement renversée par un bus ?

Irène enquêtait sur les conditions de fabrication d’une nouvelle génération de smartphone, et sur l’exploitation des minerais rares nécessaires à ces technologies. Se pourrait-il qu’elle ait été assassinée ? En se connectant à son ordinateur, sa fille Marie entre en contact avec un hackeur activiste, le jeune Léo, surnommé Hell-O. Qu’a-t-il à voir avec elle ?

Entre passé en Sierra Leone et assassinat de son père qu’elle n’a jamais connu et temps présent en France et en Belgique, c’est une enquête captivante et haletante qui nous est donnée à lire.

Personnages intéressants et attachants, intrigue engagée et informative (avec ce qu’il faut d’émotions et de sentiments aussi !), j’ai dévoré ce roman sans temps mort, et vais poursuivre mon chemin avec Marie, sa marraine Andréa et Léo (ces trois personnages forment le Collectif Black Bone), avec le tome 2, sur l’industrie de la mode.

Le projet éditorial à l’origine de la série est original : 4 personnes se réunissent pour écrire des thrillers lanceurs d’alerte sur des thèmes sociétaux et environnementaux, derrière cette couverture sans nom se cachent Marie Mazas, éditrice free-lance, Maylis Jean-Préau, journaliste indépendante, et Manu Causse et Emmanuelle Urien, deux auteurs déjà bien connus en littérature ado notamment.

Si leurs noms sont en 4ème de couv, ils s’effacent totalement derrière le projet collectif, à tel point que j’ai cru un instant que Black Bone était leur pseudo, alors qu’il s’agit du titre de la série.

Les prochains volumes doivent porter sur l’exploitation dans l’industrie textile, la déforestation, la politique et les démocraties occidentales.

Le métissage, le racisme, les liens familiaux, l’amour naissant font aussi partie des thèmes abordés dans ce premier volume. Riche, vraiment !

 

Nathan, Janvier 2020, 301 pages, prix : 14,95 €, ISBN : 978-2-09-259108-6

 

 

Crédit photo couverture : © Nicolas Vesin et éd. Nathan.

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Les roches rouges - Olivier Adam

14 Juillet 2020, 17:23pm

Publié par Laure

Antoine a dix-huit, a laissé tomber ses études et vit chez ses parents, paumé entre alcool, drogue et médicaments. Quel triste passé porte-t-il déjà sur ses épaules ? Il tombe amoureux de Leila, rencontrée à Pôle Emploi, à peine plus âgée, mariée et mère d’un petit garçon de 3 ans. Victime de violences conjugales, elle va se réfugier chez lui, qui l’emmène se réfugier aux roches rouges, une maison familiale dans le sud-est de la France où se trouve déjà sa sœur ainée qui ne souhaite plus le voir.

 

Des personnages cabossés par la vie malgré leur jeune âge, la dénonciation de violences conjugales, de l’emprise et d’un schéma familial qui se reproduit, la fuite, la peur, les drames qui s’accumulent (on découvre l’accident terrible vécu par la sœur d’Antoine et dont il est responsable), la tension qui monte dans une course poursuite effrénée pour se sauver du malheur, tout est sombre et douloureux dans ce roman d’Olivier Adam, et pourtant… de cette mélancolie qui vous enveloppe à la lecture du journal de Leila, qu’elle tient dans ce carnet offert par Antoine, du récit du jeune homme naissent aussi une lueur d’espoir dans la résilience, la volonté de s’en sortir ensemble, de soigner ses blessures au contact de l’autre, pour chacun des personnages.

 

On en ressort un peu KO, et surpris que ce roman soit publié dans une collection ados-jeunes adultes, il s’adresse pourtant à tous et aurait tout autant sa place en littérature générale.

 

A lire un soir de spleen (et c’est dans ce contexte qu’il m’a fait du bien !) ou si vous ne craignez pas la noirceur de la vie, qu’éclaire le rire du petit Gabi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ed. Robert Laffont, coll. R, juin 2020, 230 pages, prix: 17,90 €, ISBN : 978-2-221-24714-3

 

 

 

Crédit photo couverture : © Photos Stacie Lucas et Ibrahim Mushan pour Unsplash / éd. R.Laffont

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Le point sublime – Manu Causse

18 Mai 2020, 13:41pm

Publié par Laure

Autant j’avais apprécié le premier titre de cette nouvelle collection chez Thierry Magnier, (voir le goût du baiser de Camille Emmanuelle), autant je suis un peu plus mitigée sur celui-ci.

A trop vouloir en faire, on se rapproche plus du catalogue quasi exhaustif que du roman qui laisse libre cours aux fantasmes, même si reconnais volontiers que le roman est bien construit. Même si la première partie, inventaire chronologique de la masturbation infantile et adolescente de 6 à 23 ans, peut dérouter.

 

Mina Fouché se rend dans le Tarn en covoiturage, dans la maison de sa grand-mère, pour répandre ses cendres au Point sublime, ce lieu-dit au cœur de la nature, qui fut le paradis de son enfance. On pensera évidemment aux sens multiples de ce point sublime.

 

Histoire de la masturbation féminine à tout âge d’une seule et même personne (Mina), hypersexualité exacerbée de la copine Audrey, viol (qui repose la question du consentement), désir, triolisme, homo et bisexualité, histoire de la sexualité des années 1970 à nos jours, j’ai souvent eu l’impression qu’on chargeait un peu la barque, même si cet historique sexuel et familial permet de comprendre la construction de Mina.

 

Il y a de belles trouvailles, comme le métier à travers lequel Mina a choisi de s’exprimer. Le slogan de la collection est « Lire. Oser. Fantasmer ». Pour moi seul le verbe Lire s’est pleinement réalisé aussi. J’ai trop souvent eu l’impression de lire un manuel romancé d’éducation sexuelle. Mais je n’ai plus 16 ans non plus.

 

 

 

Ed. Thierry Magnier, coll. l’Ardeur, janvier 2020, 446 pages, prix : 15,90 €, ISBN : 979-10-352-0309-2

 

 

 

Crédit photo couverture : © Cha Gonzalez et éd. Th. Magnier

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PLS – Joanne Richoux

21 Avril 2020, 08:50am

Publié par Laure

« T’es beau, mon rein ». Ainsi s’ouvre ce roman destiné aux ados à partir de 15 ans (âge précisé sur la 4ème de couverture). C’est ainsi qu’Angélique (Angie) a toujours appelé son frère jumeau Sacha.

 

Ce soir, Sacha prépare une fête chez lui pour Halloween, il va revoir ses potes pour la première fois. Il est sous Xanax à haute dose, que s’est-il donc passé dans sa vie pour qu’il soit aussi mal ?

 

La soirée se déroule, entre alcool, shit, désirs adolescents. Ça m’a rappelé Tifenn : 1 – Punk : 0, de Vincent Mondiot, lu récemment. Trop de vomi et de bad trip, malgré le désir d’amour maladroit bien présent. Le mal-être de Sacha se dévoilera d’un twist, totalement inattendu, un uppercut dans l’œil du lecteur, qui revient une page en arrière pour être sûr d’avoir bien compris.

 

Le roman, qui temporellement se déroule en une nuit, de 21h03 à 03h03, joue sur ce renversement, évidemment. Et permet de le reconsidérer autrement.

 

Un roman fort sur le mal-être adolescent, le lien fusionnel avec un jumeau, le suicide.

 

Mon avis mitigé n’est dû qu’à toute la partie somme toute banale d’avant le twist….

 

 

 

Actes Sud junior, février 2020, 92 pages, prix : 13 €, ISBN : 978-2-330-13099-2

 

 

 

Crédit photo couverture : © gettyimages/Kristina Voznesenskaya/EyeEm  et éd. Actes Sud junior

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Esperluette - Anne Vantal

15 Avril 2020, 11:04am

Publié par Laure

Esperluette, c’est ce signe typographique qui signifie le mot « et ». Ici, L & J, J pour Jordan, L pour la narratrice, qui écrit une lettre à son ami disparu, des années après le drame qu’ils ont traversé. Esperluette pour ce pseudo qu’elle adoptera à un tournant de sa vie.

 

Ils ont grandi ensemble, amis d’enfance, lui moins doué à l’école, lui qui tourne mal, des petits larcins d’ado sans grande conséquence, jusqu’à ce plan dans lequel il embarque L, pour se faire de l’argent. Mais le plan tourne court, drame survient, et à jamais l’insouciance de la vie pour la jeune qui revient sur les faits des années plus tard.

 

Glaçant, beau, triste, dur, terrible, réaliste, ce roman bref (c’est la collection qui le veut : 92 pages à la première personne, d’un texte qui pourrait être lu à voix haute, c’est le format de tous les titres de cette collection, et sur la couverture, toujours un objet qui symbolise au mieux l’histoire), ce roman bref donc, touche et pose la question de la culpabilité et de la vie après, de la vie avec.

 

 

 

Actes Sud junior, mars 2020, 96 pages, prix : 9,80 €, ISBN : 978-2-330-13345-0

 

 

Crédit photo couverture : © éd. Actes Sud junior.

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Signé poète X – Elizabeth Acevedo

29 Décembre 2019, 11:58am

Publié par Laure

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Clémentine Beauvais

 

Xiomara, littéralement « celle qui est prête pour la guerre », 16 ans, a un frère jumeau, Xavier, qu’elle préfère appeler Jumeau. Ils sont le cadeau qui a permis au couple formé par leur parents de ne pas exploser.

Installés à Harlem, ils sont originaires de République Dominicaine. La religion occupe une place essentielle dans leur vie, surtout dans celle de la mère.

Et si les relations mère-fille allaient à peu près bien le temps de l’enfance de Xiomara, il en est bien autrement avec l’apparition de la puberté et des formes généreuses de l’adolescente. Victime de harcèlement, d’injures, de moqueries et blagues salaces, si sa mère veut avant tout la protéger, elle l’enferme dans un carcan insupportable, en lui interdisant toute sortie et fréquentation autres que l’église.

 

C’est dans un cours de slam lancé par sa prof de français et le carnet offert par son jumeau que Xiomara trouvera la force de s’affirmer et de se libérer, la lumière dans la puissance des mots. (P. 47) : « Parfois c’est comme si écrire, c’était le seul moyen de ne pas souffrir ».

 

La force du texte est tout entière dans son écriture en vers libres, courts chapitres de slam, poèmes signés X (pour Xiomara), que le lecteur est souvent tenté de déclamer à voix haute.

 

L’histoire en elle-même aborde des sujets classiques de l’adolescence : le désir sexuel, le premier amour, l’homosexualité, l’opposition au modèle parental, et dans celle-ci en particulier, la religion prédominante qui étouffe et contraint. Cet aspect-là est peut-être celui qui est aujourd’hui le plus éloigné de notre culture française, et encore pas tant que cela si l’on remonte trente ans en arrière.

 

La traduction de Clémentine Beauvais, romancière par ailleurs et spécialiste de la traduction en vers libres, est au top, même si bien évidemment je ne connais pas la VO, il faut néanmoins en souligner la qualité.

 

 

Un roman original et au message fort !

 

 

 

Extraits :

p. 60 : Ce qui

m’apaise

c’est mon carnet,

écrire écrire écrire,

tout ce que j’aurais voulu dire,

transformer en poèmes-lames

toutes mes pensées coupantes,

les imaginer trancher net

mon corps pour

que j’en

sorte.

 

 

 

p. 366 : « Les mots, ça donne la permission

d’être soi-même. De l’être complètement. »

 

 

 

Dès 13/14 ans.

 

 

 

Nathan, août 2019, 381 pages, prix : 16,95 €, ISBN : 978-2-09-258729-4

 

 

 

Crédit photo couverture : © Gabriel Moreno, design Erin Fitzsimmons / Nicolas Vesin et éd. Nathan

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Le goût du baiser – Camille Emmanuelle

27 Décembre 2019, 15:12pm

Publié par Laure

Aurore, 16 ans, en classe de première, n’est « ni une beauté ni une mocheté. Une fille banale, une lycéenne, dans une ville de province normale. Avec des parents normaux. Un bibliothécaire et une secrétaire médicale dans un cabinet de dentiste » (p. 12). Aurore, donc, a un accident de vélo dont elle ressort avec un léger traumatisme crânien et une anosmie doublée d’une agueusie, c’est-à-dire la perte de deux des cinq sens : l’odorat et le goût. Ce handicap invisible ne va pas faciliter sa vie d’adolescente aux prémices de sa vie sexuelle.

 

Une première expérience au cours de laquelle l’absence de ces deux sens lui joue de mauvais tours, qui pose la question du consentement, du respect (de soi et de l’autre), et des conséquences de l’usage des réseaux sociaux aujourd’hui. Mais Aurore en tirera une force exceptionnelle pour se reconstruire et s’ouvrir à un amour sincère et libre.

 

Ce titre inaugure la collection « l’ardeur », destinée aux adolescents de plus de 15 ans, qui explore le désir, la sexualité, les fantasmes mais avant tout le plaisir. On y appelle un chat un chat, le texte de Camille Emmanuelle, spécialiste des sexualités que j’avais découverte avec sa Lettre à celle qui lit mes romances érotiques et qui devrait arrêter tout de suite est frais, vivant, vibrant, plein d’humour et de réflexions pertinentes tant sur le sexe que sur l’amitié et le quotidien des ados. On y ose de vraies et belles scènes érotiques, où le plaisir va de pair avec toutes sortes de pratiques sexuelles, sans pour autant en oublier l’amour.

 

Un texte enjoué et audacieux, comme on les aime, pour des ados bien inscrits dans leur époque. Intelligent, et bien plus réaliste que des romances stéréotypées ou de la pornographie gratuite sur le web.

 

Une collection à suivre, pour le plaisir de la lecture et la qualité du projet éditorial.

 

 

 

 

Thierry Magnier, coll. L’ardeur, octobre 2019, 220 pages, prix :14,90 €, ISBN: 979-10-352-0294-1

 

 

 

Crédit photo couverture : © Cha Gonzalez et éd. Th. Magnier

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La reine sous la neige – François Place

1 Octobre 2019, 18:34pm

Publié par Laure

Une vague de froid paralyse l’Europe du Nord. Sam, dix-huit ans tout juste, qui vit avec sa mère en Afrique du Sud, devait atterrir à Amsterdam pour passer les vacances scolaires chez son père et sa belle-mère et y fêter les quatre ans de son petit-frère, mais son avion est dérouté vers l’aéroport de Londres en raison d’une forte tempête de neige. Une hôtesse va prendre soin d’elle dans un premier temps, mais les déconvenues vont vite s’accumuler : agression, vol de son téléphone portable, rien ne se passe comme prévu. Pour ne pas affoler davantage ses parents, elle va tenter de se débrouiller.

 

Deux jeunes garçons sont venus à son secours, empêchant qu’elle se fasse aussi voler ses papiers et son argent. D’ailleurs elle ne restera pas insensible au jeune Eliot, qui lui aussi s’éprendra bien vite d’elle. Mais séparés par de nouvelles mésaventures rocambolesques et le décès soudain de la Reine d’Angleterre, les amoureux parviendront-ils à se retrouver ?

 

Ce roman destiné aux ados (dès 13 ans) est frais, léger, drôle. Il surfe un peu avec le surnaturel, mais ça reste subtil. Même s’il y a peu de surprises, on prend beaucoup de plaisir à le lire. Il est assez osé pour un auteur de mettre en scène le décès d’un personnage public encore bien vivant. On imagine à la lecture qu’il ne prend pas grand risque et que ça se passera plus ou moins comme cela d’ailleurs !

 

Les personnages secondaires sont plaisants également, la fin traine un peu en longueur en même temps que l’enquête policière s’embourbe, mais qu’importe, c’est une belle histoire !

 

 

 

Gallimard jeunesse, septembre 2019, 292 pages, prix : 15 €, ISBN : 978-207-513224-4

 

 

 

Crédit photo couverture : © Shutterstock – Matthieu Roussel

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Premier arrêt avant l’avenir – Jo Witek

28 Août 2019, 10:41am

Publié par Laure

Pierre, dix-huit ans tout frais, vient de réussir son bac. Élève brillant, double lauréat du premier prix au concours général en maths et en physique-chimie, il est issu d’un milieu modeste et un bel exemple de l’ascension sociale par l’école. Méritant, il intègre le St Graal : une prépa à Henri IV à Paris.

 

C’est le jour du départ, et quelque part celui de la bascule dans le monde adulte, où l’insouciance prend fin. Mais la rencontre d’Olympe dans le TGV, une jeune fille extravertie et aux idées anarchistes et révolutionnaires, va venir troubler ses certitudes acquises et son avenir tout tracé.

 

J’ai adoré ce roman, la pertinence des pensées, le héros attachant, les réflexions sur l’asservissement au monde du travail et un modèle économique que beaucoup commencent à renier, et ces petits papillons dans le ventre du premier amour.

 

 

Jo Witek signe ici un magnifique roman initiatique, enthousiasmant et …. brillant. J’ai souvent pensé aux collégiens de 4ème-3ème avec qui je travaille, si message il y a sur les portes que vous ouvrent l’enseignement et l’éducation, mais force est de reconnaître que c’est un roman mature, qui ne donne à voir que des jeunes qui ont une connaissance du monde et une capacité à penser déjà bien avancées, des personnages bien éloignés des jeunes que je rencontre. Peut-être s’adressera-t-il davantage à des lycéens, à partir de la seconde, cet âge où l’on grandit un peu plus dans sa tête !

 

Il en reste ce discours final exceptionnel de Pierre devant sa classe, contraint et forcé par son professeur, sur l’idée qu’il a d’une classe préparatoire, et qui contraste avec le discours à l’ancienne de l’enseignant. Puisse-t-il n’être pas seulement utopiste. Oser être soi et construire avec les autres.

 

Allez les jeunes le monde de demain vous appartient !

 

 

 

Extraits :

p. 9/154 (numérique) : « Le plus dur reste à faire. […] Il a dix-huit ans. Il sait que son avenir est devant, que ce quai de gare n’est qu’une ligne de départ, une rampe de lancement, un plongeoir de dix mètres duquel il va falloir sauter. Il est pugnace, travailleur, résistant, il n’a pas peur, pourtant au bout du quai, il frissonne. Il grelotte en plein mois d’août sous un soleil de plomb.

C’est un grand jour. »

 

p.35/154 (numérique) : « Notre monde est basé sur la loi du plus fort, Pierre, la domination du plus rusé, du plus filou, du mieux né, et tant qu’on en sortira pas de cette spirale infernale qui nie la faiblesse, la différence, le doute, la tendresse, l’empathie, la générosité, l’honnêteté, la bienveillance et la poésie, cette spirale de l’homme fort qui domine tour : femmes, enfants, animaux, eh bien, rien ne changera, ouais, rien ne changera jamais ! »

 

p.81/154 (numérique) : « - Tu vois, poursuit Fabien, les yeux étincelants, je crois que la plupart des gens ont des idées, pas mal d’idées pour améliorer les choses sur cette planète déjà fragilisée, mais notre société menée en force par les lois de la finance empêche la créativité et la libre pensée. Putain, il est temps de ne plus avoir peur, Pierre, tu ne crois pas ? C’est pour ça qu’on part tous les cinq, pour prouver aux adultes que leurs modèles de réussite sociale ne peut-être plus les bons. A nous d’en inventer de nouveaux ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Actes Sud junior, août 2019, 224 pages, prix : 14,90 €, ISBN : 978-2-330-12441-0

 

 

 

Crédit photo couverture : © getty Images / gruizza / et éd. Actes Sud junior

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La théorie de l’iceberg – Christopher Bouix

22 Août 2019, 15:18pm

Publié par Laure

Été 1993. Noé, 15 ans, se remet d’un accident de surf dont il a été victime six mois auparavant. Il en garde une phobie pour l’océan et un léger bégaiement.

 

Issu d’un milieu modeste, c’est un élève plutôt réservé. Encouragé par sa professeure de français, il a toujours aimé écrire. Son embauche à la bibliothèque pour du portage à domicile l’été (sur un quiproquo d’identité) et sa rencontre avec un grand écrivain de science-fiction retiré du monde vont lui donner le coup de pouce nécessaire pour participer à un concours de nouvelles. De même sa rencontre avec Lorraine (comme la quiche ? lui demande-t-il lors de leur rencontre) va le sortir de ses retranchements et lui faire vivre ses premiers frémissements amoureux.

 

J’ai aimé la fraicheur du roman, surtout dans ses débuts : héros maladroit, traits d’humour, le lecteur est ferré et en empathie avec lui.

 

Mais à trop vouloir promouvoir les bienfaits de la lecture et de l’écriture, l’auteur en fait peut-être un peu trop au risque d’être contre-productif : les leçons de construction d’un récit de fiction et de points de vue de narration frôlent le cours indigeste pour qui n’embrasse pas la même ambition que Noé. Le grand écrivain qui y va de ses bons conseils tant en technique narrative qu’en classiques incontournables à lire à 15 ans (aucune surprise dans les titres cités), tout cela résonne un peu trop du message à faire passer.

 

Au final, un roman initiatique léger, peut-être un peu trop scolaire et pédagogique, qui plaira avant tout à ceux qui aiment déjà lire et écrire.

 

Le titre « la théorie de l’iceberg » renvoie à l’écriture d’Hemingway, qui favorise l’implicite à l’explicite.

p. 167 : « Il m’a ensuite expliqué la théorie développée par Ernest Hemingway :

- ça s’appelle la théorie de l’iceberg. Selon Hemingway, la force d’une histoire réside dans ce qui est sous-jacent. Tout ce qui n’est pas exprimé mais que le lecteur ressent. Imagine un iceberg. Les sept huitièmes sont sous l’eau. On ne les voit pas. Mais ce sont eux qui portent la masse. En littérature, c’est pareil. C’est toute cette partie immergée, cet ensemble de non-dits, qui fait la force d’un texte. »

 

 

 

Lu dans le cadre du Prix des Lecteurs 13-16 ans de la ville du Mans et du département de la Sarthe 2020.

 

 

 

Gallimard jeunesse, coll. Scripto, septembre 2018, 217 pages, prix: 10,50 €, ISBN : 978-2-07-510723-5

 

 

 

Crédit photo couverture : © Emmanuel Polanco et éd. Gallimard jeunesse

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